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Écrit par Nots   
16-12-2006

Le DSM-IV et l’ETAT sont-t-ils des pervers narcissiques non diagnostiqués ?

C. Nots

Dans la maladie mentale classique, la pathologisation de la personnalité altère à la fois le moi comportemental et intérieurement, la structure symbolique. Cependant, dans certaines pathologies mentales encore non étudiées, notamment dans les perversions bipolaires complexes, nous avons une pathologie perverse de surface avec un moi intentionnellement falsifié et bricolé (moi de façade, moi factice ou faux moi), qui a la spécificité de masquer une deuxième pathologie, souvent psychotique, au niveau de la structure symbolique ou du soi, suivant des gradients d'altération variables.

Au-delà de la facticité systématique du moi, cette variété complexe de perversions se décline comme un dégradé d'altérations du soi qui correspond différentiellement aux perversions névrotiques avec un moi pervers qui masque un soi névrotique (ou souvent un soi dépressif), aux perversions narcissiques avec un moi pervers qui masque un faux soi pervers ou un faux self pervers, aux perversions psychotiques avec un moi pervers qui masque un soi psychotique et aux perversions schizophréniques avec un moi pervers qui masque un soi schizophrénique.

Pour l'ensemble de ces perversions complexes, la personnalité est systématiquement " prothétisée " trompeusement et consciemment avec la fabrication d'une identité de façade  définissable par un faux-moi qui a pour fonction de masquer à la fois la fragilité de l'identité externe mais aussi et surtout l'extrême morbidité de l'identité interne : ce fonctionnement identitaire " atypique " se caractérise par des comportements apparemment névrotiques (pseudo-névrotiques) ou apparemment matures (pseudo-génitaux) au niveau d'un moi " bricolé " (ou faux moi) et par une fausse sensibilité interne pseudo-fonctionnelle et pseudo-humanisée (topographie de faux-sois ou de pseudo-selfs) derrière laquelle se cachent infra-cliniquement des troubles identitaires majeurs et un vécu psychotique ou pré-psychotique fait de vides intérieurs, de chaos et de clivages structuraux.

Ces prothèses artificielles soïques et moïques de camouflage, de séduction et de leurres (notamment avec des mécanismes de prothétisation du moi, avec des mécanismes de pseudo-self ou de faux-soi) sont de fait de véritables façades symptomatiques que le pervers va articuler machiavéliquement avec des techniques actives de dépersonnalisation contre autrui (ou d'hétéro-dépersonnalisation) et de prédation hétéro-identitaire. Il est important d'ajouter que certains symptômes spécifiques de ces perversions complexes sont détectables dans d'autres psychopathologies, proches symptomatiquement mais non structurellement : on les retrouve ainsi dans les psychoses pseudo-névrotiques, dans les schizophrénies pseudo-névrotiques et dans les étonnantes schizophrénies résiduelles et exotiques (dont seulement quelques entités psychiatriques répertoriées dans le D.S.M. IV et dans le C.I.M. 10).

Ainsi en terme d'humanité intérieure, un pervers pourra être profondément insensible et inhumain tout en restant socialement adapté et invisible : la littérature, l'art cinématographique et les actualités médiatiques développent régulièrement ce phénomène d'invisibilité ou de furtivité psychopathologique en décrivant des personnes victimisées qui ont des incidents existentiels ou professionnels majeurs au contact de pervers qu'elles n'ont pas sentis à cause de leur identité fictive qui cache souvent une psychopathologie interne gravissime (phénomènes que l'on retrouve aussi classiquement dans de nombreuses familles).

Par conséquent, seul l'oeil expérimenté de l'analyste pourra décrypter microsémiologiquement l'imposture identitaire. La pathologie perverse est donc grave et extrêmement déstabilisante pour l'environnement intime et social car elle émet une sémiologie difficile à cerner, avec de vrais malades mentaux qui abusent les environnements conjugaux, sociaux, médicaux et juridiques en jouant sur les registres de l'apparence, du stratège, de la confusion et de la manipulation.

Pour des raisons de complexité sémiologique, d'atypismes défensifs restés longtemps énigmatiques et à cause des impasses conceptuelles issues du pan-sexualisme post-freudien (développant la tautologie que la perversion est essentiellement sexuelle), peu de chercheurs jusqu'à aujourd'hui ont osé s'aventurer à dépasser cet oubli " politique " de la psychopathologie. Dans des approches conceptuelles équivalentes ou très proches, quelques noms de chercheurs ou de cliniciens ressortent cependant particulièrement : Jean Bergeret (en 1972) a d'abord élaboré la notion de perversion de caractère ; presque à la même période, Otto Kernberg (en 1975) a défini la notion très proche de pathologie narcissique. Quelques années après, Alberto Eiguer (en 1983) s'est intéressé à son tour au concept de pervers narcissique. Puis, en 1986, Paul-Claude Racamier reprend certains aspects conceptuels incomplets de la perversion narcissique. Très récemment, Marie France Hirigoyen, en 1998 puis en 2001, a peaufiné une nouvelle percée conceptuelle sur la perversion narcissique. Paradoxalement, il est intéressant de noter que le D.S.M. IV, fer de lance diagnostique - restrictivement  catégoriel - de la psychiatrie américaine (traditionnellement ancré dans le béhaviourisme et corollairement dans des approches purement descriptives), ne propose pas [curieusement] de définition de la perversion narcissique et se cantonne à une définition extrêmement réductrice de la personnalité grandiose (dite narcissique) dans l’Axe II du DSM-IV(avec une absence complète de diagnostic dans l’Axe I !).

De surcroît, le contexte de dénarcissisation sociétale contemporaine est profondément favorable au développement massif des pervers en tout genre qui annulent toute subjectivité d'autrui et qui se nourrissent d'un agir inhumain et sur-rationnalisé. Pour reprendre la théorie élaborée par Freud à la fin de sa vie qui pensait que les théocraties préhistoriques étaient fondées symboliquement sur le meurtre du père et sur l'hégémonie de la mère (de la subjectivité, du soi et de la sensibilité narcissique), nos technocraties actuelles semblent inversement s'être progressivement et de façon morbide fondées depuis plusieurs millénaires, sur le matricide (ou sur le menticide, sur le meurtre psychique…) de la subjectivité-mère (ou encore du soi, du narcissisme…) des citoyens et sur une position incestueuse et hégémonique de l'Etat-père (et de ses institutions incestueuses) dans l'Œdipe sociétal contemporain. Dans ce contexte schizo-cognitif propice et au coeur même de notre intimité, nous assistons à une prolifération des acteurs sociaux pervers et à une véritable industrialisation des institutions perverses qui utilisent les armes identitaires de dépersonnalisation, d'aliénation et de destruction du soi des citoyens.

Nous allons étudier dans ce paragraphe, la problématique perverse individuelle qui est très actuelle et en pleine résurgence dans les sociétés technocratiques. Dans les chapitres qui ont précédé, nous avons déjà découvert que la perversion des pouvoirs politiques, étatiques et institutionnels concerne aujourd'hui de nombreux secteurs de la société : elle contamine ainsi des structures familiales, des groupes politiques, des groupes religieux et de plus en plus les entreprises qui deviennent de véritables matrices schizogéniques où des employés sont " formatés ", dépersonna1isés et quelquefois détruits ; plus gravement, on retrouve ces méthodes, tout à fait officiellement, au coeur des institutions de la République, avec l'emploi généralisé de techniques de guerre psychologique, de guerre cognitive et de guerre pseudo-narcissique qui visent à orienter l'opinion électorale des masses technocratiques, qui visent à implanter collectivement et furtivement des sets de faux sois et des sets de faux selfs idéologiques, qui visent à déboulonner des individus gênants ou encore qui visent à hétéronomiser illégitimement de nouveaux territoires (techniques que l'on retrouve aussi dans la guerre économique, dans la guerre médiatique, dans la guerre politique, dans la guerre industrielle et dans la guerre commerciale).

Pour finir, depuis les défaites coloniales des grandes puissances militaires étrillées par de nouvelles formes de guerres subversives, civiles, révolutionnaires, spirituelles et psychologiques, les grands Etats ont développé ce nouveau concept de méta-guerre cognitive qui utilise, d'une manière systématisée, sur les zones de conflits à haute et à basse intensité, l'arme identitaire, l'arme cognitive, l'arme pulsionnelle et l'arme psychologique (guerre pulsionnelle, guerre cognitive, guerre médiatique, guerre alimentaire, guerre viro-démographique, guerre financière, guerre informationnelle, guerre économique, guerre contre-subversive et contre-révolutionnaire...).

Ces formes schizoïdes de guerre ont donc la spécificité de concentrer leurs actions sur la sidération indolore, furtive et profonde des secteurs identitaires vitaux de l'ennemi à détruire, de la société à méta-coloniser ou du citoyen à hétéronomiser : par exemple, il y a peu de temps dans le conflit du Golfe, on a assisté pour la première fois à l'emploi massif et simultané de la guerre informationnelle, de la guerre psychologique et de la guerre médiatique (par la raréfaction, par la manipulation, par la bêtification et par le contrôle intégral des images et du son).

Cette multiplication des actes de perversité est non seulement un des prodromes visible et inquiétant du lent mais réel dépérissement des fondements démocratiques des républiques occidentales mais aussi et surtout elle doit être interprétée comme un indicateur majeur de la perte de la subjectivité du citoyen contemporain.

Ce contexte de désubjectivation, en induisant une obsolescence, voire un effacement des références identitaires antérieures (altération des repères familiaux, des repères professionnels, des repères idéologico-religieux, des repères géo-politiques ; effacement insidieux des critères de la démocratie ; dépérissement visible du politique...) et une altération profonde des valeurs éthiques, civiques, morales et démocratiques, est propice à l'anomie, au cynisme, à la froideur et à l'amoralité des pathologies individuelles et systémiques perverses et à leur immersion aisée et furtive dans les sociétés technocratiques.

Il est donc aujourd'hui urgent d'étudier en profondeur la perversité pour l'identifier efficacement et pour l'endiguer à la source même de son action, c'est à dire dans l'identité profonde de chaque citoyen et dans l'intimité de chacun de nous.

LA PROTHETISATION PERVERSE DU MOI ET DU SELF

Dans la pathologie perverse, les troubles comportementaux et les troubles de la conscience symbolique (ou de la sensibilité) sont recouverts par des "prothèses" de façade (mécanismes de prothétisation intentionnelle de la personnalité) qui visent à camoufler la pathologie identitaire interne et à séduire l'environnement : le sujet aura cette capacité spécifique à cacher ses symptômes en fabricant intentionnellement des prothèses artificielles, fictives, temporaires et étrangères à sa véritable identité, faites de pseudo-sensibilités avancées et de pseudo-comportements sains.

Pour cela, on peut dire que le pervers est un sociopathe sophistiqué et toxique, expert du camouflage et de la séduction.

Cette prothétisation de la personnalité a deux objectifs principaux :

  • en premier lieu, elle a une fonction de camouflage en masquant les troubles du comportement et les difficultés de socialisation, consécutifs d'une personnalité rigidifiée, très pauvre et peu évolutive. Elle vise parallèlement à masquer une grande misère intérieure et symbolique qui rend le pervers extrêmement vulnérable, entraînant chez lui un complexe d'infériorité majeur contre lequel il lutte chroniquement ;

 

  • Ensuite, la prothétisation a une fonction de séduction qui vise à fasciner l'autre. La séduction perverse est un acte sophistiqué qui consiste à conjurer la réalité immature et chaotique de soi en la manipulant temporairement pour apparaître sous son meilleur jour. La séduction perverse est donc un acte intelligent qui va se jouer sur deux registres : tout d'abord, le pervers va " booster " et optimaliser outrancièrement et déréellement l'image de soi. Puis, dans un registre plus technique, il va chercher à identifier les manques, les souffrances et les idéaux amoureux ou existentiels de sa victime pour la combler fictivement, initialisant ainsi une première hétéronomie affective.

 

Chez le pervers, la restriction fonctionnelle du spectre relationnel et la fixation constante des modes relationnels sur de la séduction, sur de l'emprise et/ou sur du vampirisme ont valeur de symptômes en induisant une pauvreté relationnelle invalidante et peu diversifiée. Si l'on compare le fonctionnement relationnel pervers avec le fonctionnement relationnel sain, ce dernier s'exprimera très différemment dans un spectre relationnel alternatif, beaucoup plus large et beaucoup plus fluide dans lequel notamment l'attitude relationnelle de séduction sera employée à dose homéopathique et d'une manière contextuelle.

 

Au total, la séduction est une phase préparatoire pré-anesthésiante qui va introduire progressivement l'étape suivante des techniques de dépersonnalisation hétéro-personnelles qui ont pour objectif principal d'inhiber circulairement la victime afin de l'utiliser identitairement.

 

LES FAUX-MOIS OU EGO FACTICES

 

La prothétisation perverse de la personnalité va s'exprimer au niveau du moi par des comportements de camouflage très élaborés qui vont littéralement " booster " fictivement la personnalité dans une apparence saine, voire mature : stratégiquement et temporairement (temporalité souvent courte, mais pouvant durer plusieurs années suivant l'importance de l'objectif de prédation du pervers), le pervers se montrera comme un être globalement intelligent, sportif, avenant, laborieux, sociable... Son moi sera en fait un faux-moi, temporaire et bricolé. Cependant, après l'acquisition de sa " proie ", il finira toujours par enlever son masque et par montrer son vrai visage ou plutôt son vrai moi perturbé et chaotique.

LES  FAUX-SELFS

La prothétisation du Self - ou du Soi - qui va donner un faux-Self est beaucoup plus subtile à appréhender et à identifier. Ce faux soi consistera à installer une pseudo-sensibilité temporaire pour briller et pour paraître très sensible et très humanisé : l'objectif sera toujours au final de leurrer l'autre à des niveaux de précision et de minutie supérieurs.

Communément, la prothétisation fictive du Soi se retrouvera dans une pseudo-conscience et dans une pseudo-sensibilité émotionnelle. D'une manière plus élaborée, on pourra avoir une pseudo-symbolisation et une pseudo-communication symbolique (faux-Self  communicationnel et faux-self de la symbolisation) : nous aurons ainsi la mise en place consciente et stratégique d'une pseudo-fonction symbolique artificielle pour cacher à autrui une incapacité profonde à symboliser. Cette prothétisation cognitive peut aussi consister à produire un pseudo-discours symbolisant et assertif sur lui-même, mais qui possède la spécificité d'être inauthentique et surtout antérieurement préparé. La pseudo-symbolisation et la pseudo-assertivité symbolique deviendront identifiables par le fait que le pervers revient toujours sur les mêmes thèmes fragmentaires et spécialisés de son historicité. Ses buts seront donc toujours de cacher son vide symbolique ou plutôt son amputation symbolique et de leurrer l'autre ou la société avec une pseudo-humanité et une pseudo-assertivité symbolique.

LA PROTHETISATION COMME MECANISME DE DEFENSE ATYPIQUE

Les prothétisations artificielles et stratégiques du soi et du moi font partie de la batterie de défenses employée par les pervers ; cependant, ces défenses ont un statut particulier par le fait qu'elles ne sont pas inconscientes, qu'elles sont intentionnelles et qu'elles génèrent une identité fictive de façade qui n'appartient pas à l'identité réelle du pervers ; la prothétisation est donc une défense spéciale et atypique en comparaison des autres défenses du processus primaire qui sont généralement inconscientes. On peut dire aussi que ces défenses de camouflage, sur-adaptées, qui développent une apparence saine, sont équivalentes à de réels passages à l'acte psychotiques, particulièrement anti-sociaux et hétéro-agressifs tout en étant difficilement détectables sur le plan sociétal.

LE COLMATAGE DE L'ATOPISME SOÏQUE ET DE L'HYPERTOPISME  MOÏQUE DU PERVERS

La personnalité atypique du pervers est le fruit d'un travail incomplet de reconstruction et d'identification focalisé uniquement sur le moi. Les pervers sont des " survivants " qui sont devenus des " combattants " ou plus précisément des " soldats " particulièrement intelligents au niveau rationnel mais quasi-débiles au niveau de l'intelligence symbolique et qui,  contrairement aux autres pathologies mentales classiques, ont cherché à s'auto-réparer ; cependant il y a erreur sur l'étage topologique des réparations identitaires : à l'image de leur utopie ou plutôt de leur " a-topie " intrapsychique, ils ont concentré illusoirement le travail de réparation uniquement sur le moi, en occultant totalement le travail de réparation dans le soi qui pourrait fonder chez eux un début d'intégration narcissique et une introduction progressive dans la conscience symbolique et dans l'humanité.

Cette erreur topologique provoque chez le pervers un sentiment d'incomplétude identitaire lancinant qu'il va essayer de dépasser chroniquement, souvent après un effort d'auto-réparation pathétique et inexorablement superficiel, tout d'abord dans la prothétisation de sa personnalité puis d'une manière beaucoup plus fallacieuse, dans le vampirisme identitaire des autres.

Finalement, le pervers a une topique interne très pauvre en représentations mentales par le fait qu'en n'investissant pas sa sensibilité et sa capacité de symbolisation, il ne peut encoder de nouvelles données représentationnelles corporelles, cognitives et socio-écologiques. L'asymbolisation lui empêche ainsi tout travail de gestion et de réparation sur ses traumatismes infantiles (mais aussi souvent sur sa névrose actuelle !), encryptés dans son relief représentationnel ; l'asymbolisation interdit donc au pervers toute actualisation représentationnelle génitalisante.

Dans ce fonctionnement pétrifié, le pervers est dans l'impossibilité définitive de structurer un soi naissant et évolutif qui pourrait lui permettre de sentir ; il est donc construit majoritairement sur des embryons représentationnels incomplets, qui sont eux-mêmes criblés  de clivages et de résidus représentationnels infantiles non mentalisés (généralement d'origines traumatiques).

DYSFONCTIONNEMENTS PULSIONNELS DU PERVERS

En terme de dynamique pulsionnelle, les pulsions mortifères résultant du non-investissement et de la non-symbolisation de la structure intrapsychique du pervers devraient transpercer symptomatiquement sa personnalité mais les mécanismes de prothétisation sur le moi renforcés par des mécanismes de défense très lourds et très puissants dans le soi (clivage, projection, déni...) permettent aux pervers de désafférenter assez efficacement l'émergence de leur chaos pulsionnel.

En fait, les pervers ont généralement le fantasme de maîtriser parfaitement, avec omnipotence et grandiosité, leur dyssensibilité interne qu'ils considèrent comme de la sensiblerie péjorative... Cependant, malgré ce cuirassage défensif très sophistiqué du soi et du moi, les pulsions mortifères arrivent régulièrement à infiltrer leur personnalité chroniquement soit sous forme de micro-symptômes chroniques ou soit sous forme de raptus macro-symptomatiques bruyants et épisodiques qui transpercent par intermittence leur moi ; la sémiologie classique sera là insuffisante et seule la micro-sémiologie, dans le cadre d'une observation clinique (professionnelle et/ou privée) minutieuse et patiente, permettra l'identification subtile et avancée, en deçà de leur façade.

CONTEXTES VICTIMAIRES, RECUPERATIONS CONTEXTUELLE ET ENVIRONNEMENTALES ET PRESCRIPTIONS EVENEMENTIELLE OU CONTEXTUELLE

Le contexte victimaire peut être défini par un contexte identitaire particulièrement riche d'un individu qui va déclencher l'envie et le désir pervers. Ces personnalités victimisées par le pervers ne sont pas masochistes ou complices comme le pense le sens commun ou quelquefois comme le pensent des professionnels. En tant qu'analyste, je soigne quotidiennement des patients qui viennent chercher une réparation identitaire et une compréhension du phénomène pervers qui les a sidérés souvent pendant de longues années.

J'ai pu observer que ces personnalités victimaires étaient invariablement des personnalités riches (avec souvent la présence d'hyper-selfs précoces ou méta-fonctionnels très spécifiques) mais atypiques par le fait qu'elles ont toujours toutes des qualités exceptionnelles mais qu'une image très négative d'elles-mêmes, acquise dans l'enfance, les empêchait fondamentalement de s'auto-valider consciemment et de s'estimer sainement ; ces types de personnalité sont de ce fait des proies parfaites pour les pervers. J'ai pu observer aussi que la victime du pervers a une capacité exceptionnelle d'acceptation, d'insensibilité et de banalisation face au pervers par le fait qu'elle a baigné généralement dans un environnement infantile extrêmement toxique avec des parents eux-mêmes souvent pervers-psychotiques ou pervers-schizophrènes (mais non diagnostiqués comme tels).

Cela explique pourquoi la victime cherche toujours à soigner compulsivement son partenaire pervers comme elle aurait aimé soigner inconsciemment un ou plusieurs membres de sa famille quand elle était enfant.

L'utilisation opportune du contexte environnemental alimente aussi la panoplie des impostures circulaires des pervers pour infiltrer et manipuler les autres sujets : cette opportunisme contextuel provient d'une accommodation acquise dans l'enfance à un contexte infantile sordide, voire souvent chaotique. Le pervers est donc particulièrement efficace dans des contextes familiaux conflictuels, dans des entreprises destructurées ou dans des institutions fragilisées.

Le pervers a la capacité de prescrire lui-même un contexte existentiel fragilisant où il va envelopper intentionnellement sa victime dans une vie déprimogénique et dans un isolement social progressif dans laquelle il va pouvoir opérer de façon optimale. De plus, cet environnement mortifère va diluer parallèlement sa pauvreté comportementale et existentielle qui affleure sous les prothèses et cachera ainsi ses carences identitaires profondes et son manque d'individuation. Il est aussi capable, de part son hyper-rationnalité froide et son absence de surmoi (absence de conscience morale et juridique), d'orchestrer infracliniquement et à distance des incidents "prescrits", particulièrement déstructurants contre sa victime, en maximalisant ou en mettant opportunément en exergue les propriétés accidentogéniques, para-suicidogéniques ou para-criminogéniques de l'environnement. Très souvent aussi, le pervers, rompu aux méthodes de guerre psychologique et de guerre hétéro-narcissique, va concentrer ses attaques subtiles et répétées sur les faiblesses identitaires archaïques de sa victime dans le but de l'acculer à décompenser afin souvent de la dénoncer pro-activement comme mauvaise ou dangereuse : ainsi la victime décompensée deviendra bourreau-persécuteur et le pervers se transformera abjectement en pauvre victime innocente !

LES OBJECTIFS POLITICOPATHIQUES DU PERVERS

Après la première phase de pré-contact qui vise à prothétiser sa personnalité pour se dissimuler et pour séduire l'autre, le pervers va chercher graduellement mais surtout de façon indolore et infraclinique à immobiliser et à isoler sa victime afin de la garder à disposition pour ponctionner séquentiellement certains secteurs de sa personnalité.

Pour cela, il va infiltrer et fragiliser le territoire psychique et identitaire de sa " bio-cible " pour lui empêcher toute velléité de prises de conscience, de rébellion, de résilience, de dégagement et de fuite. Nous aurons alors une mise en batterie de techniques intentionnelles de dépersonnalisation qui viseront à hétéronomiser indolorement et furtivement la victime en fragilisant répétitivement et focalement ses secteurs identitaires stratégiques (Processus conscients d’identifications projectives fisionnelles et inanitaires du pervers dans les identités sexuelle, communicationnelle, administrative, financière,  émotionnelle, professionnelle, amicale, sociale, existentielle, etc. de la cible-victimaire à utiliser, à instrumentaliser puis à… décapiter).

LES TECHNIQUES HETERO-IDENTITAIRES DE DEPERSONNALISATION ET DE PREDATION IDENTITAIRE 

Les techniques de dépersonnalisation du pervers relèvent donc d'un processus conscient et intelligent de paralysies hétéro-identitaires progressives et millimétriques, constitué par des micro-agissements agressifs, répétitifs et furtifs sur les secteurs-clés de l'identité corporelle, de l'identité cognitive et de l'identité socio-écologique de la cible.

Une sur-intellectualisation froide et obsessionnelle sur-ajoutée à une absence de conscience morale permettent à ces types de personnalité d'accéder à un machiavélisme anticipatoire très raffiné dans leurs comportements existentiels pour manipuler leur partenaire conjugal, leur famille, des groupes sociaux ou des institutions par identifications projectives multiples et raffinées(de type fusionnel, fissionnel, inanitaires, etc.).

C'est dans ce sens que le pervers est un sociopathe : ses prothèses comportementales visent à tromper autrui pour l'utiliser identitairement à certains endroits, là-même où il aura lui-même des carences identitaires ; on peut parler d'une imposture comportementale en vue d'une manipulation fine et organisée qui se finalisera par la prédation globale de la victime.

Ces prothèses de séduction et d'apparence " lisse " lui permettent ainsi d'infiltrer intimement des personnes fragiles dans des buts de ponctions identitaires et d'utilisations hétéro-personnelles insidieuses (identifications sintrojectives très sélectives et… conscientes) pour suppléer à ses propres manques identitaires : le pervers utilisera, chez sa  " proie ", son identité narcissique, son identité sexuelle, son identité filiale, son identité sociale, son identité financière, son identité intellectuelle, son identité symbolique (sensibilité générale, capacité d'assertivité symbolique), son identité familiale ou son identité génétique.

Dans ma pratique clinique, j'ai appelé ce phénomène "syndrome de la Barbie" et "syndrome du Ken" : dans les relations intimes d'un pervers avec une cible, ce syndrome correspond à la séduction, à la dépersonnalisation et à la prédation identitaire profonde d'une personnalité particulièrement riche (mais pour des raisons infantiles excessivement perméable aux séductions narcissiques et présentant elle-même des brèches narcissiques importantes) par une personne perverse, identitairement très déficitaire qui va pallier par procuration à ses manques. Dans ce sens, de nombreuses relations pseudo-amoureuses correspondent à ce cas de figure, avec une interactivité conjugale non-transformative, non-équitable, ligaturante et vampirisante.

La victime possède ainsi très souvent des qualités exceptionnelles que le pervers narcissique voudra absolument s'approprier et utiliser ou à l'inverse, qu'il voudra détruire (cas fréquents pour les enfants globalement doués présentant généralement une précocité symbolique, une précocité intellectuelle ou quelquefois une précocité bicamérale qui naissent dans des familles pathogéniques ou cas de personnes très humaines qui travaillent, par exemple, dans des entreprises dépersonnalisantes ou dans des institutions d'Etat toxiques).

La victime sera souvent une personne très belle physiquement, particulièrement sensible, très diplômée, très riche ou très performante socialement ; elle pourra posséder aussi des qualités artistiques avancées, une créativité rare ou une intelligence exceptionnelle ; souvent encore, le pervers s'approprie la belle-famille en remplacement intégral de sa propre famille, humainement ultra-déficitaire.

LA PULSION HOMICIDE " RESIDUELLE " DU PERVERS

L'intentionnalité homicide ou l'objectif de mise à mort identitaire de la victime n'est pas le but initial du pervers : son but initial sera d'abord l'appropriation du narcissisme de sa proie dans une coercition indolore et subtile.

Cependant, à long terme, il est possible d'identifier dans le processus pervers hétéro-personnel deux niveaux d'intentionnalité homicide avec des gradients d'intensité différents et avec des planifications chronologiques précises :

  • Dans un premier temps qui correspond à une phase standard et infraclinique, on peut parler de mise à mort lente et insidieuse car les techniques de dépersonnalisation intentionnelles du pervers, qui visent initialement à inhiber globalement la proie, finissent à long terme par l'user. La victime, au fil des années de saccages et de harcèlements, va structurer des zones de clivage identitaire dans lesquelles une partie de ses représentations mentales corporelles, cognitives et socio-écologiques, vont être progressivement émoussées, abrasées et quelquefois détruites.

Cette décompensation lente, véritable meurtre identitaire furtif et " poly-topique " (notion de meurtre psychique blanc et/ou infraclinique et notion de menticide blanc), poussera la victime inéluctablement vers la dépression, l'épuisement, le morcellement psychique et quelquefois la mort (par cancérisation, par rafales tératogènes de décompensations psycho-somatiques et neuro-végétatives, par suicide, par para-suicide automobile ou sportif...) ;

  • Dans un deuxième temps qui correspond à la phase terminale du processus pervers sur la victime, l'intentionnalité homicide apparaît au grand jour, bruyamment et avec férocité, car la victime, qui était auparavant un "ustensile" utile et docile, finit généralement par se réveiller et surtout par se rebeller ; l'ustensile utile devient alors un objet dangereux qui identifie les manipulations, les prothétisations et la dualité du pervers. Elle met à jour les vides et les chaos identitaires de son bourreau que celui-ci avait jusqu'alors longuement et finement cryptés et prothétisés ;

 

  • Dans la phase terminale, le pervers, qui présente souvent des tendances psychotiques paranoïaques résiduelles, va se sentir persécuté par l'ex-victime : l'objet utile deviendra alors un objet persécuteur qui va ébranler son moi grandiose, sa mégalomanie et son pouvoir totalitaire. Le haine, le machiavélisme et l'inhumanité vont affleurer brutalement ; le pervers va donc lui-même commencer à décompenser en dévoilant une violence directe et visible : dans l'intimité et ce, généralement sans témoin, il va menacer sa victime verbalement et physiquement, il va la terroriser psychiquement, il va la pilonner minutieusement sur ses points de fragilité identitaire et il va chercher à la pousser au suicide ou au parasuicide. C'est d'ailleurs dans ce processus terminal que les praticiens disent que le pervers est suicidogène ou parasuicidogène, il est donc dangereux mais c'est très rare de le voir passer à l'acte homicide direct (sauf dans le cas rarissime d'un raptus criminel de décompensation).

Malgré l'intensité de cette violence terminale, le pervers n'est pas structurellement un psychotique et s'il l'est, ce sera temporairement dans des incursions ponctuelles dans le délire, dans les persécutions, dans les hallucinations ou dans la déréalisation. Ces incursions psychotiques " en pointillées " correspondent à l'ouverture et à la pulsionnalisation projective d'un " pool restreint d'enclaves psychotiques " déjà anciennes qui nichent infracliniquement et silencieusement dans son relief intrapsychique depuis l'enfance et qui apparaissent électivement à la phase finale quand celui-ci décompense après la rébellion puis aprés le retrait salvateur " insupportable " de la victime.

Les résurgences pulsionnelles terminales du pervers qui décompensent sont généralement des pulsions de meurtre, des pulsions de destruction, des pulsions nécrophiliques malignes et des pulsions d'hétéro-extermination.

LA DISSIMULATION DE L'INTENTIONNALITE HOMICIDE PAR LE PERVERS

Le pervers, étant partiellement soumis au principe de réalité, possède quand même une conscience résiduelle de la loi et du meurtre ; il va donc élaborer une intentionnalité meurtrière invisible et cachée qui se fera toujours souterrainement, indirectement et par procuration, en ne laissant aucun indice et aucune preuve de sa volonté de meurtre pourtant parfaitement planifiée et bien réelle.

Ainsi, les preuves du harcèlement et les preuves des agressions répétées seront rarement visibles ou seront diluées. Par rapport à la Justice ou à la police, le pervers narcissique essaie finalement par anticipation machiavélique et par pharisaïsme maniaque, d'amener sa future ex-victime à la mort, en ayant spécifiquement cette capacité à garder une apparence légale, tout en violant consciencieusement et profondément la loi.

Cette volonté de meurtre contre sa victime (ou cette pulsion de meurtre) a pour objectif essentiel d'empêcher absolument la divulgation de sa psychopathologie secrète : sa folie privée et intime, sa nocivité, sa profonde méchanceté et sa dualité schizo-cognitive doivent absolument être mises en réserve pour ne pas être livrées à la transparence de l'environnement intime et social.

Le pervers est finalement un " clandestin " qui doit absolument protéger son identité factice et surtout le secret absolu sur son vide narcissique et sur les clivages gravissimes de son soi.

Il peut ainsi éviter toute remise en question qui le terrifie et que la transparence et le décryptage pourraient dangereusement décompenser en déterrant une psychose latente ou souvent une dépression mélancolique qui sourde depuis longtemps. En retardant le plus longtemps possible le scandale inévitable de la révélation, le pervers se bat adroitement pour rester apparemment irréprochable. Quelquefois dans le fin du fin de l'abjection, il ira même jusqu'à se poser en victime de sa victime qu'il a suicidée.

Complémentairement, la mise à mort blanche permettra au pervers de se déresponsabiliser en projetant toute la responsabilité sur sa victime décédée ou gravement décompensée dans un discours manipulatoire qui la présentera pro-activement comme folle, malade ou irresponsable.

Dans cette entreprise de déresponsabilisation très sophistiquée, le pervers projettera souvent secondairement la responsabilité de la fin funéraire ou psychiatrique de sa victime sur le psychiatre, sur le psychanalyste ou sur le juge qui seront intervenus à un moment donné de la problématique du couple ou du " pseudo-lien " familial.

LES TECHNIQUES PERVERSES DE L'HOMICIDE BLANC (OU HOMICIDE  FURTIF)

Pour finir, il est intéressant de survoler succinctement les différentes techniques d'homicide blanc que le pervers emploie au stade terminal du processus manipulatoire pour pousser subtilement sa victime à se suicider, à se parasuicider, à décompenser somatiquement ou à décompenser psychiquement.

L'intentionnalité homicide blanche du pervers se structurera dans des mises en scène hétéro-suicidogéniques, accidentogéniques et hétéro-destructrices qui viseront à valider manipulatoirement ses projections machiavéliques et ses objectifs de meurtre blanc ou de crime " parfait " :

  • par exemple, il est courant que le pervers incite verbalement sa victime dans l'intimité et sans témoin, à se suicider,

 

  • pour provoquer un parasuicide, le pervers va chercher à la mettre dans des situations accidentogéniques (disputes opportunes avant un long trajet en voiture de la victime, instillation volontaire dans la vie de la victime d'objets et de lieux dangereux, mise en relation de la victime par le pervers avec des personnalités toxiques ou à fortes tendances criminelles...),

 

  • Pour la décompenser psychiquement ou somatiquement, il va employer souvent électivement des moyens particulièrement élaborés : avec le très classique " rapt de filiation furtif " par la personne perverse en post-divorce qui consiste notamment à saccager par petites touches d'identification projective l'image de l'autre parent pendant plusieurs années (rapt de filiation symbolique ou encore le très classique Syndrome d’Aliénation Parentale), avec des délations institutionnelles répétées contre son ex-victime (martelages épistolaires de dénonciations délirantes et vindicatives adressés au Parquet, au Trésor public, à la Gendarmerie, au Commissariat de Police...), avec une kyrielle de procédures juridiques infondées et interminables, avec des essais répétitifs et machiavéliques de désocialisation et d'isolement de l'ex-victime en manipulant son environnement amical, en infiltrant son environnement familial, en saccageant son environnement professionnel, etc.,

 

  • Items non exhaustifs.

FURTIVITE, MICROCLINICITE ET COMPLEXITE DES SYMPTOMES PERVERS

Nous avons vu précédemment que l'insensibilité intrapsychique et les troubles comportementaux pervers sont recouverts par une "façade" artificielle d'apparat. La fraude est d'autant plus efficace que leurs stratégies micro-comportementales de surface sont régulièrement calculées et re-calibrées au fil de longues années d'expérimentations intersubjectives morbides.

Cependant, le pervers reste détectable en présentant une signature micro-symptomatologique chronique, maximalisée par intermittence par des raptus bruyants et visibles ; ces personnalités globalement cryptophiles émettent donc une micro-symptomatologie très subtile qui correspond à une micro-sémiologie ultra-spécialisée et quasi-furtive qui indique l'état morbide de la personnalité : communication riche intellectuellement mais non impliquée ; sexualité pseudo-fonctionnelle où se greffent des dysfonctionnements coïtaux ou orgasmiques ;  pseudo-sérénité émotionnelle infiltrée par une incapacité à sentir les émotions extrêmes comme la tristesse, la joie ou le mépris ; moralité apparemment irréprochable tempérée par des micro-fraudes administratives ou fiscales récurrentes ou par des incivilités régulières ; spectre relationnel apparemment génital parasité par des rafales de micro-agressivités récurrentes…

Ensuite, elles émettent ponctuellement une macro-symptomatologie bruyante se transcrivant par des raptus violents et incontrôlés, issus des décompensations psychiques courtes et brutales ou issus d'une baisse de vigilance du pervers qui oublie quelquefois de " prothétiser " ou de " façader " devant sa victime. Ces raptus sont aussi ponctuellement visibles, dans certains contextes particuliers où le pervers ne maîtrise plus ses prothèses de surface (contexte de confusion temporaire du pervers ou contexte de " décompensation " de la victime qui " endort " le pervers).

Pour synthétiser ce tableau clinique particulièrement subtil, nous allons étudier en détail la micro-sémiologie des pervers qui nous permettra de les détecter :

  • La conscience et l'expressivité émotionnelle sont très émoussées : le pervers n'a pas la capacité à identifier et à verbaliser ses émotions brutes en sentiments précis. Cependant, dans la phase de séduction initiale, il arrive souvent temporairement à fabriquer un faux-soi émotionnel où il théâtralise bruyamment et fictivement un vécu émotionnel pseudo-profond et pseudo-authentique (populairement les fameuses "larmes de crocodile").

 

  • L'identité sexuelle apparaît comme pseudo-fonctionnelle ; elle est systématiquement perturbée par des dysfonctionnements sexuels qui trahissent le pervers dans l'intimité : désordre de l'orientation sexuelle, érotisations atypiques, érotisations perverses, addictions sexuelles et sexoses diverses (baisse ou absence du désir sexuel, frigidité, vaginisme, aphanisis, panne d'érection, éjaculation précoce...).

 

  • L'identité autoscopique (capacité de conscience topographique de soi ou capacité d'intégration des instances de la personnalité) est investie dyssynchroniquement : le moi est surinvesti, hypertrophié, prothétisé et grandiose ; le soi - ou le self -, d'où émane normalement la conscience symbolique générale et la sensibilité, est totalement ou sub-totalement désinvesti. Du haut de ce moi surinvesti et prothétisé, le pervers se perçoit comme supérieur (sentiment de grandiosité) et n'a strictement aucune capacité à se remettre humblement en question.

 

  • Compensatoirement, son soi dévitalisé est maintenu artificiellement en vie par prédation, par transfusion et par vampirisation de la sensibilité interne (ou du narcissisme) d'une autre personne " ponctionnée " : on peut parler de perfusion ou de transfusion intentionnelle du pervers par hétéro-narcissisme (de la victime). De plus, son surmoi, non investi, lui permet une insensibilité morale, éthique et juridique à toute épreuve.

 

  • La mentalisation du pervers, excentrée monolithiquement et massivement sur l'intellect et sur une hyper-rationnalité obsessionnelle en boucles, est amputée de sa capacité de symbolisation. Sa mentalisation symbolique (ou sa symbolisation) reste embryonnaire ; cependant, certains pervers très " doués " arrivent ponctuellement à générer une pseudo-mentalisation symbolique contextuelle.

 

  • La communication intellectuelle et rationnelle a la spécificité d'être particulièrement performante. Quant à sa communication symbolique, elle reste totalement absente, sans implication de soi et sans assertivité symbolique profonde et authentique. Quelquefois, le pervers émet une pseudo-assertivité symbolique temporaire pour leurrer sa proie (faux soi symbolico-communicationnel). Le pervers peut encore générer une pseudo-assertivité symbolique "opportune" en se calant analogiquement et stratégiquement sur les attentes identitaires profondes de la future " proie " en "façadant en miroir" des zones très ciblées de pseudo-narcissisme qui correspondent électivement aux attentes " romantiques " ou " idéalistes " de la victime...

 

  • En deçà de cette communication sur-intellectualisée et déshumanisée, le pervers réussit souvent aussi à fabriquer un arsenal " dys-communicationnel " sophistiqué qui vise à mystifier et à mettre l'interlocuteur dans la confusion : mensonges, désinformations multiples, disqualifications et annulations intentionnelles et répétitives des données symboliques de l'autre, sous-entendus, manipulation consciente des marqueurs contextuels de la communication (tonalité de la voix inadaptée, gestes ou postures inhabituelles, émotions incongrues, regards et attitudes faciales bizarres, modes relationnels dyssynchroniques, utilisation stratégique ou création opportune de contextes sociaux ou expérientiels atypiques...).

 

  • L'identité défensive (du processus primaire) des pervers a la spécificité d'être consciente et très typée ; elle sur-utilise consciemment un spectre défensif anormalement réduit et ultra-spécialisé de défenses spécifiquement psychotiques et hétéro-schizogéniques : sur-utilisation anormale des mécanismes d'hétéro-dépersonnalisation ou d’identifications projectives fissionnelles et fusionnelles, de certains mécanismes de défense relationnelle (sur-utilisation de la relation d'instrumentalisation d'autrui, de la relation d'emprise et de la relation de séduction), des mécanismes de prothétisation du moi (ego factices), des mécanismes de prothétisation du Soi ou du Self (Noria de faux-Selfs difficilement identifiables au début), des mécanismes de prescription contextuelle (identifications projectives contextuelles), des mécanismes de prescription symptomatique, des mécanismes de prescription évènementielle, des mécanismes de prédation ou de vampirisation hétéro-identitaire (identifications introjectives) ou encore des déjà connus - mais souvent très furtifs – mécanismes de forclusion.

 

  • L'identité offensive (du processus secondaire) reste largement inutilisée chez le pervers : celui-ci, contrairement au fonctionnement offensif relativement mature du névrosé standard, a un fonctionnement offensif très immature (et pseudo-génital) ; il n'utilise donc pas (ou peu) ses mécanismes de dégagement et de résilience : non-utilisation des mécanismes de sublimation, des mécanismes de symbolisation, des mécanismes de résilience, des mécanismes d'introspection, des mécanismes de maturescence représentationnelle, des mécanismes méta-représentationnels, des mécanismes de coping, etc.

 

  • L'identité relationnelle du pervers fonctionne typiquement sur une relation schizoïde d'instrumentalisation des autres : communément, dans un sorte de " jeu d'échec relationnel et social ", il va déléguer " gratuitement " à ses " brebis séduites et dépersonnalisées " - mais riches sur certains secteurs identitaires - des tâches socio-professionnelles " d'intérêts personnels " qui vont l'enrichir surtout personnellement (" pseudo-collaboration " professionnelle, " pseudo-collaboration " financière, " pseudo-collaboration " territoriale, " pseudo-collaboration " administrative, " pseudo-collaboration " intellectuelle, " pseudo-collaboration " sexuelle, " pseudo-collaboration " juridique, etc…).

 

  • La " délégation d'intérêts " est particulièrement performante pour le pervers car elle présente l'avantage sordide d'être beaucoup plus furtive que la classique ponction identitaire directe qui risque toujours d'être rapidement décryptée par certaines victimes trop vigilantes ou trop lucides. Le pervers ne considère donc pas ses pairs comme des humains mais comme des " ustensiles-poubelles utilisables puis jettables à volonté " qui lui permettent de " survivre " et de progresser… sociétalement.

 

  • Parallèlement, l'identité relationnelle est figée sur un spectre réduit de modes relationnels inadéquats alors qu'elle devrait employée normalement l'ensemble des modes relationnels d'une façon spectrale et contextualisée. Elle fonctionne ainsi restrictivement sur des relations de séduction, des relations d'emprise, des relations de prédation, des relations violentes et des relations d'hétéro-destruction furtives.

 

  • L'identité sociale et la socialisation sont habituellement sur-investies et représentent le fer de lance de la prothèse perverse de séduction. Le pervers est souvent un ergomaniaque qui, non seulement réussi souvent socialement et professionnellement, mais qui affine, à un degré extrême, les autres secteurs périphériques de la socialité (habillement "kitsch", véhicule de couleur sombre et toujours très propre, appartenance politique ou secto-politique correspondant à la place, militantisme associatif d'apparat, passions opportunes - et non viscérales - à haut rendement de façadabilité sociétale...).

 

  • En deçà des frasques de ces pervers de choc, le pervers standard est, heureusement, moins performant ; il reste communément socialisé par procuration (utilisation manipulatoire des biens financiers et matériels de sa victime, de sa famille ou de sa belle-famille). Cependant, cette socialisation apparemment brillante et séduisante est trahie par un manque notoire d'hygiène existentielle et par une vie pétrifiante, dérisoire ou austère (relation fusionnelle caricaturale à sa famille et /ou à sa belle-famille, absence de culture physique ou sportive, temps de loisir substitués par des activités péri-professionnelles ou claniques…).

 

  • L'identité conjugale et l'identité filiale correspondent toujours initialement, à un pseudo-engagement manipulatoire. Elles vont toujours se dégrader proactivement au fil des ans, en théâtralisations amoureuses déprimogéniques, en humiliations conjugales très élaborées (adultères récurrents, absences répétées, difficultés financières...) et en maltraitances filiales subtiles (syndrome de Münchausen par procuration, surprotection symbiotique ou ligaturante de la filiation, délégation chronique et furtive de la filiation...).

 

  • L'identité morale, l'identité juridique, l'identité civique et l'identité démocratique sont quasi-absentes chez le pervers : le pervers n'a donc aucune sensibilité humaniste et éthique. Superficiellement, il présente souvent une pseudo-moralité avancée et une pseudo-humanité de façade qui sont trahies généralement par des incivilités récurrentes plus ou moins illégales (affairisme, fraudes diverses...), par un élitisme antidémocratique incongru (par exemple, appartenance secrète à une secte politique pseudo-initiatique ou encore à des associations pseudo-humanitaires ou para-philanthropiques...) et par une absence totale de remords et de culpabilité.

 

  • Le pervers a un tropisme exacerbé par rapport aux problématiques de la mort, du sacrifice, de l'inceste, de l'incestuel (fortes tendances incestueuses), du pouvoir (le plus souvent sous des formes interpersonnelles despotiques et furtives), du meurtre, de la psychose, de la schizophrénie (…), problématiques qu'il a violemment vécues puis encryptées psychiquement au cours d'une enfance souvent très douloureuse dans le cadre d'un environnement familial généralement schizophrénogénique.

 

  • Pour survivre et pour éviter une décompensation psychotique " potentielle " qu'il arrive souvent à anticiper - non pas par ressenti symbolique mais grâce à sa sur-intellectualisation obsessionnelle -, il va "se soigner" différentiellement en contrôlant totalitairement et infracliniquement ses environnements intimes et socio-professionnels, en s'auto-transfusant secrètement sur le narcissisme de certaines personnes et en " injectant " régulièrement les contenus traumatiques, hyper-pulsatoires et jamais symbolisés de ses cryptes à l'intérieur des autres. Ainsi, il " jouit " et " jubile " à mettre en acte et à « transfuser », sur et dans ses victimes, des protocoles furtifs de mises à mort lentes et subtiles, des protocoles furtifs de harcèlement moral et de guerre psychologique, des scénarios furtifs parasuicidogènes ou accidentogènes contre autrui, des procédures furtives de menticide " dans " certaines personnes " incontrôlables " ou des batteries furtives de micro-agissements séducteurs, incestueux ou incestuels, socialement invisibles et très déstabilisants...  L'abjection de ces cryptes que le pervers propulse et transfuse férocement dans ses victimes, dans sa famille et dans certaines institutions explique l'étendue des dégâts collatéraux que l'on observe dans chaque dénouement pervers terminal (notamment dans les radiations professionnelles disciplinaires, dans de nombreux divorces et dans de nombreuses affaires judiciaires).

 

L'ETAT PERVERS 

 

Dans les chapitres précédents, nous avons analysé minutieusement les pathologies du pouvoir en plaçant notre centre de gravité analytique sur les problématiques sulfureuses et très actuelles des pouvoirs politiques et étatiques. J'ai prouvé par le menu que les pathologies du pouvoir existent aussi spécifiquement chez les entités identitaires non biologiques de nature étatique ou encore de nature institutionnelle. Complémentairement, dans ce chapitre, nous avons développé l'étude exhaustive des pathologies perverses, résultant de la pulsion de pouvoir, en plaçant restrictivement notre analyse au niveau interpersonnel.

Au total, nous sommes arrivés à démontrer que la perversion du pouvoir existe simultanément autant, au niveau systémique, dans les institutions politiques et étatiques, qu'au niveau micro-social, entre chaque citoyen.

Elle s'appuie ainsi toujours systématiquement :

 

  • sur une aliénation furtive de la subjectivité symbolique d'un " proche ", d'un citoyen ou d'un groupe social à hétéronomiser (par hétéro-dépersonnalisations multiples, par hétéro-castrations furtives, par exponentialisation volontaire de certains mécanismes de défense très puissants du processus primaire et par castration des mécanismes de dégagement et de résilience du processus secondaire),

 

  • et sur l'usinage secret de leur système pulsionnel (par exacerbation intentionnelle des déclinaisons pulsionnelles découlant de la pulsion de mort et par inhibition savante des déclinaisons pulsionnelles découlant de la pulsion de vie).

Le but sera toujours un but totalitaire d'emprise inter-personnelle ou de soumission politique collective.

Quelles que soient ses formes systémiques (étatiques, institutionnelles, etc.) ou inter-individuelles, un pouvoir pervers pourra être défini opérationnellement comme " un processus d'étrillage trans-subjectif, dépersonnalisant et infra-clinique " qui aura la spécificité d'être généré intentionnellement et secrètement par l'entité perverse à l'intérieur même du relief cognitif d'un autre individu ou à l'intérieur du relief identitaire (identité logistique, identité informatique, identité publicitaire, identité financière, identité administrative, etc.) d'une entité systémique quelconque (entreprise, institution, groupe, Etat, etc.).

Techniquement, il consistera :

  • à exponentialiser chez la cible victimaire les avatars pathogéniques et inconscients issus de ses pulsions de mort et de ses pulsions de " destrudo " (pulsions de guerre, pulsions de combat, pulsions de domination, pulsions de commandement, pulsions schizocratiques, pulsions de persécution, pulsions de mondialisation, pulsions d'autorité, pulsions de dénonciation, pulsions d'étatisation, pulsions de destruction, pulsions suicidaires, pulsions menticidaires, pulsions sociocidaires, pulsions électorales, pulsions de condamnation, pulsions de terrorisme, pulsions de meurtre, pulsions sacrificielles, pulsions impériales, pulsions patriotiques, pulsions nationalistes, pulsions européo-centristes, pulsions de domestication, pulsions de servitude, pulsions d'obéissance, pulsions de conformisme, pulsions de consommation, pulsions nécrophiliques, pulsions coloniales, pulsions héroïques, pulsions de discipline, pulsions victimaires, pulsions d'extermination, pulsions personnalistes...),

 

  • et à disqualifier les avatars sanogéniques et identisants issus de ses pulsions de vie, de ses pulsions de contre-pouvoir et de ses pulsions libidinales (pulsions de liberté, pulsions de symbolisation, pulsions autocratiques, pulsions prophétiques, pulsions messianiques, pulsions d'insoumission, pulsions herméneutiques, pulsions altruistes, pulsions égalitaires, pulsions de résilience, pulsions fraternelles, pulsions subversives, pulsions de don, pulsions écologiques, pulsions créatives, pulsions esthétiques, pulsions humanistes...).

Pour conclure, face à l'industrialisation contemporaine de ces nouvelles formes toxiques de pouvoir interpersonnel, institutionnel et étatique, nous avons tous, en tant que sujets et en tant que citoyens, les moyens de réguler consciemment et millimétriquement nos pulsions archaïques de vie et nos pulsions archaïques de mort, en identifiant les mécanismes psychiques et pulsionnels sous-jacents en jeu. Mais, cette régulation cognitive consciente de l'être humain ne pourra se faire dans le futur que quand au niveau macro-politique, les nouveaux mythes étatiques de la mondialisation techno-scientifique, de la mondialisation techno-économique, de la mondialisation techno-militaire et de la mondialisation impériale seront régulés et tempérés consciemment par l'ensemble des citoyens (ou nous aurons détruits !) et qu'au niveau micro-politique, chaque citoyen acceptera de sentir qu'il fonctionne sur des repères et des " re-mères " pulsionnels et cognitifs " faussés " et instrumentalisés par les Etats.

L'industrialisation récente des techniques étatiques de dépersonnalisation nous laisse ainsi entrevoir la pire des armes méta-gouvernementales dans le cadre de ces nouveaux concepts militaires effrayants de guerre pulsionnelle, de guerre cognitive et de guerre anti-narcissique qui planifient le champ de bataille à l'intérieur même du Soi des techno-citoyens et bientôt à l'intérieur même de l'identité symbolique de l'ensemble de l'espèce humaine, à l'échelon mondial.

Il m'a paru ainsi évident que l'amélioration de nos sociétés technocratiques ne pourra se faire sans le respect de l'homme envers l'homme... La connaissance de ces mécanismes symboliques largement "occultés" scientifiquement et culturellement, pourrait à terme nous aider à prendre conscience profondément de nos archaïsmes cognitifs qui nous étrillent depuis plusieurs milliers d'années ; nous pourrons ainsi peut-être commencer réellement à nous actualiser humainement afin d'œuvrer collectivement pour des démocraties plus avancées où primeraient activement l'humanisme, la liberté, l'égalité et la fraternité et non le bellicisme, l'impérialisme, le commercialisme, l'oligarchisme et le mondialisme.

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In " Le Livre Noir de la Psychiatrie. Géopolitique des psychotropes, du DSM-IV et de la psychiatrie américaine ", Chapitre VIII, A paraître en 2008.       

Dernière mise à jour : ( 03-12-2007 )
 
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